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Quand les pneus se font mousser !

Quand les pneus se font mousser !

Quand les pneus se font mousser !

Magazine Science & Société | Décryptage #3 | Rupture[s]

 

Pamella Pasetto, enseignante-chercheuse en chimie vous ouvre les portes de son laboratoire et vous raconte qu'une seconde vie est possible pour les pneus usagés. Écoutez le podcast !

 

Les pneumatiques, composés de caoutchouc naturel et synthétique, ont toujours été une source de casse-tête pour qui souhaite les recycler.

« Il est chimiquement impossible de recycler des pneus pour en faire de nouveaux », annonce d’emblée Pamela Pasetto, enseignante-chercheuse en chimie à l’Institut des Molécules et Matériaux du Mans (IMMM - UMR CNRS 6283).
En effet, avant commercialisation, les pneus sont vulcanisés, c’est-à-dire traités par addition de soufre, afin d’améliorer leurs propriétés mécaniques et leur résistance aux variations de température.
Heureusement, l’histoire ne s’arrête pas là, sinon, l’article serait un peu court… Il y a trois décennies, l’IMMM se penchait déjà sur la valorisation du caoutchouc naturel (issu de l’Hevea brasiliensis), parfois en collaboration avec des pays producteurs tels que l’Inde, le Vietnam, la Thaïlande ou la Malaisie. L’enjeu était alors était de fragmenter les grandes chaînes de molécules (polymères) qui constituent le caoutchouc naturel, en chaînes plus courtes (oligomères), pour ensuite les mettre en réaction avec des produits du commerce et fabriquer ainsi des mousses ou des films, tout en préservant les propriétés élastiques du caoutchouc.

Dans les années 2000, le laboratoire a appliqué ce même processus aux pneus, qui contiennent à la fois du caoutchouc naturel et du caoutchouc synthétique. Il est parvenu à déposer un brevet international sur la question, brevet resté cependant dans les tiroirs.

De l’ameublement à l’équipement automobile

Il y a quelque temps, l’équipe de Pamela Pasetto a repris les travaux, avec une nouvelle impulsion.
« Une doctorante travaillait sur la synthèse de mousses à partir de « briques » de caoutchouc naturel. Je lui ai suggéré d’essayer avec des briques issues de pneus. Nous disposions de poudrettes de pneus inutilisées en laboratoire. Elle a mis au point une formulation et elle a obtenu les premières mousses. Cette réussite a rapidement évolué en projet d’envergure, toujours en cours aujourd’hui. La SATT Ouest Valorisation (Société d’Accélération du Transfert de Technologies) a notamment financé deux post-doctorants pour optimiser les rendements, depuis le traitement des poudrettes à la production des briques, en collaboration avec une entreprise sous-traitante », poursuit Pamela Pasetto.

Il faut savoir que les pneus usagés sont généralement destinés à des fins énergétiques (par exemple incinérés pour faire fonctionner les fours des cimenteries) ou broyés sous forme de poudrette pour servir de base dans la construction de terrains de sport synthétiques.

L’IMMM a réussi à transformer ces poudrettes au moyen de deux réactions chimiques simples, obtenant ainsi des briques qui peuvent être utilisées pour créer de nouveaux matériaux polyvalents : des mousses souples ou rigides employées dans l’ameublement (par exemple canapés, rembourrages, chaises), dans l’automobile (poignées, toits, etc.) ou comme isolants thermiques et acoustiques.

Bien que la mise à échelle du procédé soit encore en cours, trois industriels spécialisés dans les matériaux en polyuréthane et actifs dans différents secteurs, ont déjà exprimé leur intention d’adopter cette technologie. Une machine de production pilote pourrait bientôt voir le jour pour accélérer cette transition.
Ces entreprises ont un intérêt direct à s’engager dans cette démarche.


La réglementation exige que les industriels intègrent au moins 20 % de matière recyclée ou biosourcée dans leur production, conformément à la Loi Anti-Gaspillage pour une Économie circulaire du 10 février 2020.

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